[Colombie] – La recette du kebbe nayye par Antoine Floch d’Agoradventure
Dans le cadre de notre projet Ursino, nous vous invitons chaque mois à découvrir une recette traditionnelle partagée par un chef, une célébrité ou un.e anonyme.
Découvrir un plat, son histoire, comment il est consommé ou encore les souvenirs qui y sont rattachés, c’est précisément ce que font nos élèves tout autour du monde.
Sur cette base, ils mènent des recherches pour découvrir l’origine des plats et de leurs ingrédients.
L’objectif : qu’ils découvrent par eux-mêmes que nos cultures, notamment culinaires, se sont de tous temps enrichies de la diversité et des rencontres entre les peuples.
Ce mois-ci c’est Antoine Floch, cuisinier voyageur qui se cache derrière le compte instagram @Agoradventure sur lequel il partage des recettes de gastronomie japonaise et ses expériences au Japon, qui s’est prêté au jeu du questionnaire Ursino.
© 196 flavors
Présente-nous une recette traditionnelle qui te tient à coeur..
Une recette libanaise : le kebbe nayye qui est un plat de mon enfance. Mes deux parents sont à moitié bretons et à moitié libanais. Mon père est né au Sénégal et ma mère a grandi au Brésil. Ça faisait partie des plats de fête dans le village avec les voisins et le lendemain on faisait cuire la viande en boulettes.
Qui préparait ce plat ? Comment t’a-t-il été transmis ?
C’est ma maman qui préparait ce plat, chez nous la cuisine c’était toujours en famille donc petite à petit on apprend en faisant.
Que t’évoque ce plat ? As-tu des souvenirs particuliers ou des anecdotes qui y sont liés ?
Ça m’évoque les repas de fête dans l’esprit repas de quartier. Chacun apporte quelque chose. J’ai grandi dans les Cévennes dans un petit hameau de 14 habitants et mes parents avaient lancé cette tradition.
On fait les courses ensemble, on prépare ensemble et le lendemain on mange tous ensemble.
As-tu connaissance d’autres variantes de ce plat ?
Toutes les versions du plat sont les mêmes dans ma famille. Souvent ce qui change ce sont les épices, dans certaines familles, ils y mettent des pétales de rose. À l’origine, la viande c’est de la chèvre ou de l’agneau.
Il y a aussi toutes les versions cuites qu’on fait le lendemain avec la farce aux oignons et pignons.
On fait les choses différemment selon les pays (notamment en fonction du climat). Au Liban c’est impossible d’utiliser de la viande hachée au delà du jour même, même le matin pour le soir.
Ce plat te semble-t-il plutôt ancien ou récent ? À quel territoire penses-tu qu’il soit rattaché ?
Plutôt ancien. À la base ce n’est même pas libanais. On le retrouve en Syrie et au Liban. Chaque famille le prépare différemment. C’est assez particulier et en dehors du Liban on en mange peu.
Ça demande une certaine logistique notamment par le boucher. Je ne pense pas que ça se perde pour autant.
Certaines sources disent que c’est plutôt syrien, d’autres disent que le Liban a créé la version qu’on connait aujourd’hui.
Comment et quand ce plat est-il consommé en général ?
Traditionnellement c’est un plat de fête car c’est un moment où on tue un animal. On le retrouve parmi les mezzés avec plein d’autres plats. Moi je l’ai plus connu avec du vin ou du thé mais au Liban il peut être consommé avec de l’arak. Au Sénégal c’était avec les 3 thés verts traditionnels.
» Dans énormément de pays, malgré toutes nos différences c’est la cuisine qui réunit «
Existe-t-il des rituels de consommation de ce plat ?
Oui, toutes les familles font des variantes. Quand on prépare le plat, on fait des petits trous dans la viande et on peut ajouter de l’huile d’olive et de la menthe.
Y a-t-il d’autres plats traditionnels que tu as à cœur de transmettre à tes proches ?
Mes neveux et nièces n’ont plus beaucoup de liens avec le Liban. J’aimerais leur faire découvrir la cuisine japonaise, la cuisine franco-japonaise et la cuisine franco-libano-japonaise.
À quoi associes-tu la cuisines et le temps du repas ?
Pour moi c’est toute ma vie et j’ai du mal à concevoir que les gens n’accordent pas plus de temps au plaisir de cuisiner et partager grâce à la cuisine. On créé du lien social et du lien culturel. Il n’existe pas beaucoup de marqueurs culturels aussi forts pour rassembler autre que la cuisine.
Dans énormément de pays, malgré toutes nos différences c’est la cuisine qui réunit. C’est le plus gros marqueur humain que de créer un événement autour de la cuisine. On a en commun le fait de créer de la magie.
La recette du kebbe nayye
Ingrédients
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500 g de viande de bœuf maigre (ou porc)
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200 g de boulgour fin
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Oignons nouveaux
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Épices (cumin, coriandre en poudre, sel, poivre)
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Glaçons
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+ Huile d’olive, menthe et pain libanais pour le service
1. Hâcher la viande très finement (la passer minimum deux fois dans le hachoir)
2. Faire tremper le boulgour la veille, l’écraser avec les mains pour enlever l’eau et mélanger avec la viande
3. Ajouter 2 glaçons dans la viande
4. Ajouter les épices, sel et poivre
5. Dresser dans le plat, chez nous un plat ovale en faisant trois sillons au doigt dans la longueur et mettre de l’huile d’olive dans les sillons
6. Décorer avec des feuilles de menthe sur le dessus
Bonus
Quelle est ta madeleine de Proust ?
Le poulet aux olives
3 invités que tu aurais envie de réunir autour d’une table de dîner ?
Paul Bocuse (une des raisons pour lesquelles je fais de la cuisine professionnellement et que j’admire énormément). Quelqu’un qui travaille dans la mode, Jean Paul Gauthier par exemple pour pouvoir parler de ce que c’est la mode de manière physique et métaphysique. On serait à table jusqu’au petit matin. Et Anne Sophie Pic car je pense que c’est quelqu’un de simple et qui donne tout.
Un restaurant à nous conseiller ?
Alinea à Chicago : une expérience folle. Tout n’est que spectacle. Tout est incroyable et pas que la nourriture. L’expérience la plus folle que j’ai jamais vécue en restaurant.